vendredi 11 octobre 2013

Le messie. Mise au point sur le messianisme. Film de Dominique Aubier


dans la série Ciné-Code DVD 19

Film de Dominique Aubier
DVD, 1h 10 mn
Réalisation : Olivier Verger

Le messianisme ! Ce terme plonge dans un mystère qui tracasse les esprits. On voudrait savoir de quoi il s’agit. Et d’abord, qu’appelle-t-on « messie » ? Selon l’usage qui en est fait, le Messie serait venu avec le Christ. C’est l’opinion chrétienne. Pour les Juifs, il s’agirait d’une formulation absolue, livrant la vérité éternelle, phénomène prévisible mais non encore échu. Ainsi, le Messie serait venu pour les uns et en attente d’arrivée pour les autres. Comment avoir une claire idée, que ce soit en terme de constat ou d’espérance ? La controverse fait que le problème reste à régler.
Pour apprécier au plus près cette énigme, Dominique Aubier se réfère au mot hébreu « messie ». Vocable fondateur, de quoi est-il chargé ? Son sens est suspendu à une notion cosmologique selon laquelle la terre puisse être pensée en termes d’anatomie et de physiologie nerveuses : une région du monde remplirait la fonction de l’aire de Wernicke, preneuse de sens. D’après la tradition juive, ce serait Israël. L’hébreu serait alors la langue utilisée par le Créateur pour parler le Cosmos et Jérusalem serait le point d’impact sur terre de cette parole fondatrice. Qui dès lors douterait que la révélation assumée par l’hébreu ne soit immense ? Qui pourrait s’offrir le luxe de la dédaigner ?
Mais l’énergie poursuit son parcours et il faut distinguer entre son intégration première, l’état acquis en tant que mémoire culturelle, et la nécessité qu’elle a d’irradier de nouvelles régions du monde. C’est ici qu’intervient l’opération messianique. Selon la prévision biblique du prophète Obadia, elle saurait prendre copie du message de manière à l’orienter vers les Nations : l’Espagne serait ce lieu de passage vers l’expression universelle. C’est la prouesse que réalise Cervantès. Il récupère les données informationnelles issues de la tradition hébraïque et leur confère l’enroulement structurel. Il invente le roman comme vecteur de la leçon et, en style mimétique de la vie, transporte et transmet la Connaissance hors du fief judaïque. Il est, dans le cycle du messianisme, la partie génitrice. Son texte métabolise les critères du système de vérité et son héros, Don Quichotte, brisant la consigne du secret pesant sur le référentiel, le fait sortir de son retrait l’exposant au grand jour, au chapitre de la Tête enchantée ! Don Quichotte m’a enseigné la mouture de la structure du Modèle absolu, dit Dominique Aubier : le messianisme, c’est le nom de cette première exposition, sous couvert de symbolisme, attendu qu’une seconde mise au clair intervienne un jour, conformément au processus en deux temps prévu par la tradition. La transmission suivante doit, selon la même prophétie biblique, se réaliser France, pays de la parole exprimée. Ne serait-ce pas le grand dessein de la France, que livrer l’explication messianique à l’universalité ?
Rendant hommage à l’extraordinaire prise de conscience du réel endossée par le judaïsme, saluant l’intervention prodigieuse de Cervantès dans la perspective de la métabolisation civilisatrice, ce film, 19ème de la série Cinécode, se positionne au déversoir de cette élucidation, étant lui-même une pierre apportée à l’édifice chargé de faire émerger la vérité.
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Film de Dominique Aubier


En résumé :
— Le messie rétablit les critères sacrés en leur conférant une validité irrévocable.
— Le messianisme est une mise au point décisive de la table des critères initiatiques.
Et Jésus, se demandera-t-on ? Après avoir visionné ce film, on se reportera utilement au livre Catalina où Dominique Aubier explicite de rôle du Christ dans le processus messianique.
Le Christ est un personnage considérable, explique Dominique Aubier… A mon sens, il a mesuré historiquement une situation dramatique. Son martyre sur la Croix montre l’image d’une souffrance injuste, d’une condamnation qui ne devrait pas exister. Il y a, sur le Tzadé que représente la Croix, un homme cloué. Image effrayante du sort de l’humanité ! Le « péché d’Eve » est à l’origine de son malheur. Jésus interprète ce malheur-là. Chaque fois qu’un cycle intérieur fait ressurgir l’erreur d’Eve au titre du retour en phase du thème archétypal, la mort vise le côté parlé de l’évolution. L’erreur d’Eve a été de croire en la continuité linéaire de la productivité matérielle, en la croissance continue — le serpent — et d’ignorer le processus évolutif. Cette ignorance nous menace.
Le Christ est à l’origine d’une ligne de développement spécifique, de métabolisation historique qui passe par Rome et par la Science. En sorte que l’Occident est spécifiquement concerné par la Croix. De la Croix naîtra, a contrario, la science. Et que naît de la science ?
La Croix est un signal très important. On dit d’ailleurs, « faire le signe de la croix ». Il consiste à tracer une verticale du front au bas du sternum et d’une épaule à l’autre, à l’horizontale. La verticale, c’est la ligne du temps. L’horizontale, c’est la ligne de séparation des opposites. La Croix nous envoie, par delà les millénaires, l’image même de ce qui nous arrive. Le Christ tombe en croix, il meurt, les bras écartés. Cela signifie que le cycle à venir, quand il ouvrira ses deux bras, subira le même supplice. Il restera suspendu à son schéma structural, sans trouver de solution miraculeuse. La Croix annonce ce qui va se produire, mais elle indique aussi le moyen d’éviter le pire… D’où la résurrection. Celle-ci n’est possible que si nous nous dotons de l’instrument permettant de décrocher le Christ. Cet instrument, c’est la Connaissance. Celle que le messie reçoit, transmet et met au point de manière décisive. Que ce soit clair : le Christ n’est pas l’auteur de cette mise au point, il en est cependant l’annonciateur symbolique. La Croix, symbole terrifiant, est implantée dans l’Histoire, elle s’élève sur un cycle frappé de commotion. La mise en croix de l’homme juif, supplicié par le pouvoir, représente la négation du verbe par l’ignorant. Cette mise en croix de l’homme porteur des symboles de l’Absolu n’est-elle pas l’annonce monstrueuse de la Shoa ?
La Croix a la puissance de recueillir l’avertissement du danger de mort qui vise l’humanité, en un point précis de l’Histoire, elle montre aussi la possibilité du salut… La possibilité du salut est une promesse, une promesse certaine, puisqu’elle a été vécue par le médiateur. La Croix avec son homme crucifié, c’est l’image de l’humanité écartelée sur le Tzadé en cours. La Croix s’érige à la croisée des chemins, entre la Gauche et la Droite d’une flexion qui propage la Connaissance en dépit de tous les obstacles et effondrements spirituels. L’Histoire se porte garante de cette évidence. La Croix nous dit de redouter l’endroit du Tzadé dans l’édifice cyclique. C’est pourquoi Jésus est appelé Nazir, c’est à dire l’homme du Tzadé. Il indique le passage à franchir. Pour réussir la traversée, les bons sentiments, les rituels, la dévotion ne sont pas suffisants : il faut une claire connaissance du Principe, du référentiel, il faut connaître les armes de YHVH…

Dominique Blumenstihl-Roth